Le droit est reconnu aux collectivités publiques de déposséder un particulier de son bien pour une utilité publique (celle-ci doit être prouvée par un projet). La procédure d’expropriation est complexe. Elle s’appuie sur un droit ancien visant à défendre l’intérêt général tout en ne spoliant pas les propriétaires.
Les Voyageurs doivent savoir faire valoir leurs droits sans aucune appréhension face à une complexité juridique qui pourrait les inquiéter.
CONDITIONS DE LÉGALITÉ DE L’EXPROPRIATION
L’expropriation ne peut intervenir que pour une opération d’utilité publique.
L’exproprié doit bénéficier d’une indemnité juste et préalable à l’incorporation du terrain dans le patrimoine de la puissance publique qui exproprie. En cas de désaccord l’exproprié doit pouvoir disposer de voies de recours, notamment sur les indemnités de dépossession (coût du terrain et les préjudices subis).
Les procédures de l’expropriation sont réglementées par le code de l’expropriation. Elles se déroulent selon quatre phases :
- la déclaration d’utilité publique
- la déclaration de cessibilité
- la fixation des indemnités
- le transfert de propriété
LA DÉCLARATION D’UTILITÉ PUBLIQUE
Cette obligation d’information du public, inscrite dans les textes, vise à informer le public, recueillir les avis et observations du commissaire enquêteur et des services consultés et prononcer l’utilité publique qui légitime l’expropriation.
La déclaration d’utilité publique se déroule en six étapes :
1. la définition de l’avant-projet
Pour une commune, la délibération du conseil municipal demandant l’engagement de la procédure d’expropriation est une étape importante car elle informe les citoyens de ce qui va se passer. Cette phase se situe en amont de la procédure.
2. l’arrêté d’ouverture de l’enquête
Elle est toujours prononcée par un arrêté du préfet qui indique l’objet de l’enquête, le nom du commissaire enquêteur, les conditions du déroulement de l’enquête (lieu, durée, heures de consultation du dossier et de réception du commissaire enquêteur).
3. l’avis d’ouverture de l’enquête
Elle fait l’objet d’une publication dans les journaux.
4. le déroulement de l’enquête
La durée de l’enquête est généralement d’un mois et ne peut être inférieure à 15 jours. Le dossier comprend normalement :
- une notice explicative
- un plan de situation
- un plan des travaux
- la description de ce qui est prévu
- l’estimation de l’opération
Toutes les personnes intéressées peuvent consulter le dossier en mairie (c’est-à-dire toute personne qui s’intéresse au projet, qu’elle soit expropriée ou non, qu’elle réside dans la commune ou non) et formulées leurs observations écrites dans le registre d’enquête ou adresser une lettre au commissaire enquêteur.
5. Les conclusions du commissaire enquêteur
Le commissaire enquêteur rédige un rapport dans lequel il formule un avis sur l’opération (cet avis peut être favorable ou défavorable, il peut aussi contenir des réserves ou des recommandations). Il doit en adresser une copie au Maire et à toute personne qui en fait la demande.
6. L’acte déclaratif d’utilité publique
La déclaration d’utilité publique (DUP) est l’acte qui donne sa base légale à l’opération d’expropriation et qui en précise le délai. Elle est de la compétence de l’Etat, ce qui signifie que le préfet peut refuser de prononcer la DUP pour des motifs de droit ou d’opportunité. Le contenu de la DUP doit être conforme au projet. Elle a un caractère purement déclaratif et ne peut être évoquée par les élus comme outil de pression.
LA DÉCLARATION DE CESSIBILITÉ
La phase de cessibilité intervient avant la procédure judiciaire de l’expropriation.
Elle a pour objet de déterminer la consistance des parcelles à exproprier et l’identité des propriétaires.
Elle comprend :
- une enquête parcellaire engagée par un arrêté préfectoral
- un arrêté de cessibilité du préfet ; c’est la décision par laquelle le préfet déclare cessibles les propriétés dont l’acquisition est poursuivie par l’administration, Il peut faire l’objet d’un recours mais seulement par le propriétaire foncier.Le point de départ du délai de recours, qui doit être formé dans les deux mois suivants, est la date de publication de l’arrêté.
LA FIXATION DES INDEMNITÉS
La fixation des indemnités obéit à une procédure formalisée et compliquée qui est fixée par le Code de l’expropriation. On ne peut que souhaiter le recours à un avocat pour éviter des erreurs de procédures préjudiciables. Elle se déroule en neuf étapes :
- la dénonciation des ayants droit. Elle concerne peu les Voyageurs.
- l’offre de la collectivité qui exproprie est notifiée par lettre recommandée avec accusé de réception. Elle informe l’exproprié des différentes indemnités et l’invite à faire connaître ses demandes pendant un délai de 15 jours. L’exproprié n’est pas tenu de répondre aux offres qui lui sont faites. C’est une phase où peuvent s’exercer tout type de pressions sur les voyageurs.
On ne peut que conseiller de ne jamais accepter les propositions faites, ni céder aux pressions ou au chantage que les élus peuvent exercer. Deux hypothèses sont en présence : ne pas répondre à l’offre ou y répondre en faisant valoir ses prétentions, une étude au cas par cas est donc à faire.
- l’échange des mémoires
Les mémoires contiennent l’exposé des arguments de l’expropriant et de l’exproprié pour justifier leurs positions Tous les échanges de courriers doivent être faits en recommandé avec accusé de réception.
- la saisine du juge de l’expropriation par l’expropriant ou l’exproprié
- l’ordonnance de transport sur les lieux est prise par le juge de l’expropriation
- la visite des lieux qui permet au juge de procéder à un état des lieux
Cette visite est importante car elle peut permettre d’obtenir des indemnités pour le préjudice subi par l’expropriation même si les règles d’urbanisme ne permettaient pas l’installation des résidences mobiles.
- l’audience est caractérisée par une procédure écrite incluant toutes les pièces justificatives des arguments énoncés.
- le jugement indemnitaire : c’est le juge qui statue sur le montant des indemnités accordées à l’exproprié. Les indemnités doivent être réparties en indemnités principales et indemnités accessoires.
Les indemnités sont généralement fixées en espèces, mais elles peuvent être fixées aussi en nature (c’est pourquoi il peut être intéressant d’aller jusqu’à l’expropriation pour obtenir des indemnités accessoires, voire un autre terrain).
- la voie de recours qui permet d’interjeter appel de la décision du juge de l’expropriation.
LA PRISE DE POSSESSION
La prise de possession ne peut intervenir qu’un mois après le paiement intégral des indemnités ou leur consignation. Toute occupation anticipée serait irrégulière.
LE DROIT DE RÉTROCESSION
Si, dans un délai de cinq ans, les immeubles expropriés n’ont pas reçu la destination prévue par la déclaration d’utilité publique ou ont cessé de la recevoir (à moins qu’une nouvelle déclaration publique ne soit requise), les anciens propriétaires ou leurs ayants droit peuvent en demander la rétrocession pendant un délai de trente ans à compter de l’ordonnance d’expropriation (art. L421-1 du Code de l’expropriation pour cause d’utilité publique).